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Le kitch et l'esthétique de la mièvrerie
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carolus
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Forum des Artistes Lorrains :: LE CAFÉ DES ARTS : DÉBATS ET DISPUTES :: Débats sur l'histoire et la philosophie de l'art
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Re: Le kitch et l'esthétique de la mièvrerie
On sent que l'Eugène a du avoir quelques ennuis avec ses copines. "Ca commence à bien faire, Eugène, il faut choisir, c'est moi ou la peinture !"
Dernière édition par Thierry Marié le Mer 26 Déc 2012 - 15:18, édité 1 fois
Re: Le kitch et l'esthétique de la mièvrerie
... on est d'accord, alors tu peux dire en peignant passionnément
Cath- Messages : 161
Points : 256
Date d'inscription : 13/10/2010
Re: Le kitch et l'esthétique de la mièvrerie
Je ne savais pas que le ptit nom de Carolus c'était Eugène
Cath- Messages : 161
Points : 256
Date d'inscription : 13/10/2010
Re: Le kitch et l'esthétique de la mièvrerie
Cath a écrit:... on est d'accord, alors tu peux dire en peignant passionnément
Oui, parce que peindre sérieusement, moi je vois tout de suite les oeuvres et la tête de Mondrian qui n'avait pas l'air de rigoler beaucoup en traçant ses carrés.
Peintre sérieux
Re: Le kitch et l'esthétique de la mièvrerie
La figure de l'artiste romantique dévoré par sa passion créative est un modèle parmi d'autres, qui est apparu très récemment avec la théorie "de l'art pour l'art". C'est d'ailleurs un élément de la mythologie artistique servant à cautionner les prix indécents pratiqués sur le marché de l'art (les oeuvres des artistes fous ont la cote). Je lui préfère le modèle plus ancien de l'artiste humaniste qui s'efforce d'être un homme complet , comme Leonard de Vinci, qui était peintre, savant, architecte, chercheur, écrivain, ingénieur, organisateur de spectacle, etc. Ce qui est intéressant c'est justement que les travaux accomplis en dehors de la peinture se retrouve aussi dans sa peinture et contribue à sa richesse.
Je suis cependant d'accord avec le fait que l'art demande un certain engagement et qu'il ne prend sa véritable signification que dans une pratique visant à toujours s'améliorer, en ne cherchant à plaire ni aux puissants ni à la multitude. Le film "Tous les matins du monde" d'Alain Corneau est un des rares qui met en scène sans affectation excessive le désir de pureté artistique (musicale en l'occurrence). La passion et le sérieux entendus dans ce sens, OUI.
Je suis cependant d'accord avec le fait que l'art demande un certain engagement et qu'il ne prend sa véritable signification que dans une pratique visant à toujours s'améliorer, en ne cherchant à plaire ni aux puissants ni à la multitude. Le film "Tous les matins du monde" d'Alain Corneau est un des rares qui met en scène sans affectation excessive le désir de pureté artistique (musicale en l'occurrence). La passion et le sérieux entendus dans ce sens, OUI.
Re: Le kitch et l'esthétique de la mièvrerie
Humour et sérieux sont fort heureusement compatibles.
Et puis qui sait ? Mondrian rigolait peut être en douce quand certains prenaient au sérieux ses théories très/trop sérieuses.
Accepter la supériorité de (ses) maitres (les vrais), c'est accepter la hiérarchie du mieux et du moins bien.
C'est le premier pas vers la progression. Comme dit S. Kearns, progresser, c'est ajouter de la qualité à son travail. Or il s'agit d'avoir un/des référent(s) de qualité pour progresser. Cela serait trop facile d'attribuer ses propres critères de qualités. Bonjour le totalitarisme de la subjectivité.
Je suis d'accord avec Delacroix quand il dit qu'il faut savoir se détacher de l'influence des maitres. Mais pour se détacher et trouver sa propre voie, il faut bien commencer par être influencé. L'influence venant bien sûr de l'étude (sérieuse ).
Il m'est arrivé de discuter avec des personnes qui remettent en question les maitres. Naturellement, la production artistique de ces personnes est toujours médiocre/d'un goût plus que douteux. Parce que ces personnes ne s'intéressent pas à l'excellence artistique ou trop peu, ils ne la voient pas et sont emprisonnés dans leur médiocrité.
Il faut d'ailleurs voir les ravages des mauvaises influences dans les ateliers contemporains où la liberté est totale qui donnent un florilège de travaux kitch: le petit africain ou la petite afghane, le cheval qui se cabre, les bébés trop mignons façon Anne Geddes, les symboles prétentieux de tous poils, les effets gratuits de toute beauté, etc.
D'autres personnes (parfois les mêmes) prennent un grand plaisir quand ils peuvent placer une anecdote concernant la vie de grands artistes en espérant briller par l'étalage de leur culture. Si la culture est une bonne chose, réciter l'histoire de l'art n'est pas comprendre la peinture. Aller au musée pour de mauvaises raisons non plus.
Et puis qui sait ? Mondrian rigolait peut être en douce quand certains prenaient au sérieux ses théories très/trop sérieuses.
Accepter la supériorité de (ses) maitres (les vrais), c'est accepter la hiérarchie du mieux et du moins bien.
C'est le premier pas vers la progression. Comme dit S. Kearns, progresser, c'est ajouter de la qualité à son travail. Or il s'agit d'avoir un/des référent(s) de qualité pour progresser. Cela serait trop facile d'attribuer ses propres critères de qualités. Bonjour le totalitarisme de la subjectivité.
Je suis d'accord avec Delacroix quand il dit qu'il faut savoir se détacher de l'influence des maitres. Mais pour se détacher et trouver sa propre voie, il faut bien commencer par être influencé. L'influence venant bien sûr de l'étude (sérieuse ).
Il m'est arrivé de discuter avec des personnes qui remettent en question les maitres. Naturellement, la production artistique de ces personnes est toujours médiocre/d'un goût plus que douteux. Parce que ces personnes ne s'intéressent pas à l'excellence artistique ou trop peu, ils ne la voient pas et sont emprisonnés dans leur médiocrité.
Il faut d'ailleurs voir les ravages des mauvaises influences dans les ateliers contemporains où la liberté est totale qui donnent un florilège de travaux kitch: le petit africain ou la petite afghane, le cheval qui se cabre, les bébés trop mignons façon Anne Geddes, les symboles prétentieux de tous poils, les effets gratuits de toute beauté, etc.
D'autres personnes (parfois les mêmes) prennent un grand plaisir quand ils peuvent placer une anecdote concernant la vie de grands artistes en espérant briller par l'étalage de leur culture. Si la culture est une bonne chose, réciter l'histoire de l'art n'est pas comprendre la peinture. Aller au musée pour de mauvaises raisons non plus.
Re: Le kitch et l'esthétique de la mièvrerie
La culture c'est comme la confiture: moins on en a , plus on l'étale !
Francette- Messages : 98
Points : 116
Date d'inscription : 06/12/2012
Re: Le kitch et l'esthétique de la mièvrerie
La conjugaison d'une absence de culture classique et du bain dans un monde où des milliers d'images nous entrent chaque jour dans l'esprit (toutes mises au même niveau par la culture de masse) produit le résultat décrit par Carolus. Les têtes sont farcies de clichés, que les gens veulent reproduire. Il n'est pas rare de voir, comme c'est arrivé près de Nancy il y a quelques années, 3 tableaux dans la même exposition qui étaient des copies de la même photo de couverture du magazine GEO. Cette coïncidence n'était pas volontaire et n'est apparue qu'une fois l'expo installée et ouverte au public. L'effet était assez ridicule (mais amusant aussi).
Dans les ateliers, on peut lutter contre cette tendance en passant un "contrat" avec les personnes qui souhaitent apprendre "sérieusement" la peinture (ce qui implique une transformation de soi et de son rapport au visible qui peut être perturbante avant de se révéler passionnante).
C'est bien aussi qu'il existe des ateliers pour les gens qui prennent le dessin et la peinture plutôt pour une activité récréative, il en faut pour tous les publics et on perdrait du temps à vouloir convertir. On ne peut guère être juge à la place des autres de ce qui est bon pour eux, on peut seulement en tant qu'enseignant poser soi-même les conditions de sa participation à une opération culturelle, en fixant un objectif de qualité et une méthodologie.
Il plus facile de faire comprendre que Raphaël peignait mieux techniquement que Matisse (et qu'il est donc un meilleur maître au sens technique) que de prouver qu'il avait meilleur goût. C'est le genre de polémique "molle" qui fait perdre beaucoup de temps parce que les critères de notre jugement de goût ne sont pas objectivement communicables (alors que les critères techniques le sont). Les gens ressentent aussi toujours comme une agression le fait qu'on leur dise qu'ils ont tort d'aimer ce qu'il aiment. Ce ne serait pas diplomate et probablement guère utile. Il ne suffit pas qu'une chose soit vraie, il faut qu'elle puisse être entendue.
Dans les ateliers, on peut lutter contre cette tendance en passant un "contrat" avec les personnes qui souhaitent apprendre "sérieusement" la peinture (ce qui implique une transformation de soi et de son rapport au visible qui peut être perturbante avant de se révéler passionnante).
C'est bien aussi qu'il existe des ateliers pour les gens qui prennent le dessin et la peinture plutôt pour une activité récréative, il en faut pour tous les publics et on perdrait du temps à vouloir convertir. On ne peut guère être juge à la place des autres de ce qui est bon pour eux, on peut seulement en tant qu'enseignant poser soi-même les conditions de sa participation à une opération culturelle, en fixant un objectif de qualité et une méthodologie.
Il plus facile de faire comprendre que Raphaël peignait mieux techniquement que Matisse (et qu'il est donc un meilleur maître au sens technique) que de prouver qu'il avait meilleur goût. C'est le genre de polémique "molle" qui fait perdre beaucoup de temps parce que les critères de notre jugement de goût ne sont pas objectivement communicables (alors que les critères techniques le sont). Les gens ressentent aussi toujours comme une agression le fait qu'on leur dise qu'ils ont tort d'aimer ce qu'il aiment. Ce ne serait pas diplomate et probablement guère utile. Il ne suffit pas qu'une chose soit vraie, il faut qu'elle puisse être entendue.
Re: Le kitch et l'esthétique de la mièvrerie
Francette a écrit:La culture c'est comme la confiture: moins on en a , plus on l'étale !
Et pareil pour la peinture quand on arrive à la fin du tube !
Re: Le kitch et l'esthétique de la mièvrerie
Je crois comprendre ce que vous voulez dire : j'ai moi-même fréquenté ces endroits sympathiques et conviviaux mais au bout d'un moment cela ne me "nourrissait" plus , bref, j'ai fini par m'y ennuyer....C'est bien aussi qu'il existe des ateliers pour les gens qui prennent le dessin et la peinture plutôt pour une activité récréative, il en faut pour tous les publics et on perdrait du temps à vouloir convertir. On ne peut guère être juge à la place des autres de ce qui est bon pour eux, on peut seulement en tant qu'enseignant poser soi-même les conditions de sa participation à une opération culturelle, en fixant un objectif de qualité et une méthodologie.
Ce n'est pas diplomate et probablement guère utile. Il ne suffit pas qu'une chose soit vraie, il faut qu'elle puisse être entendue.
Si une seule personne est "interpellée" peut-être pas sur le moment d'ailleurs ...ça vaut le coup même si je me rends compte que certains profs "prêchent "dans le désert
J'ai remarqué que beaucoup de gens se ferment dès que les choses leur semblent inaccessibles... des phrases comme "je n'y comprends rien , ce n'est pas pour moi", l'histoire de l'art ça me"gave"..etc...
Et lorsqu'on a la chance de trouver un forum comme celui-ci , et qu'on travaille seule ou presque, je vous assure que c'est un pur bonheur pour moi!
Francette- Messages : 98
Points : 116
Date d'inscription : 06/12/2012
Re: Le kitch et l'esthétique de la mièvrerie
"Il ne suffit pas qu'une chose soit vraie, il faut qu'elle puisse être entendue."
Très juste.
Cependant, en tant que prof je suis libre de donner le ton de mes cours ... fermeté ou souplesse.
Pas de prosélytisme ni de soucis diplomatiques en ce qui me concerne. L'élève comprend très vite où il met les pieds et s'il reste c'est qu'il accepte le "contrat" initial. Je n'ai pour le moment pas à déplorer l'abandon de mon cours par des élèves écœurés par la rigueur de mon enseignement , bien au contraire.
A chaque rentrée, je constate une hostilité grandissante vis à vis de la pédagogie officielle qui préfère la liberté absolue dans l'apprentissage à la rigueur traditionnelle.
Un enseignement rigoureux est naturellement dogmatique au même titre qu'un enseignement récréatif est plus libre.
Que l'élève souhaite t'il ? Progresser ou se détendre ? A l'élève de trancher. Et au professeur le soin d'assouplir trop de rigueur ou d'affermir trop de laisser-aller. Le choix de l'élève étant initialement fortement influencé par la production artistique du professeur, révélatrice de la teneur du cours.
Très juste.
Cependant, en tant que prof je suis libre de donner le ton de mes cours ... fermeté ou souplesse.
Pas de prosélytisme ni de soucis diplomatiques en ce qui me concerne. L'élève comprend très vite où il met les pieds et s'il reste c'est qu'il accepte le "contrat" initial. Je n'ai pour le moment pas à déplorer l'abandon de mon cours par des élèves écœurés par la rigueur de mon enseignement , bien au contraire.
A chaque rentrée, je constate une hostilité grandissante vis à vis de la pédagogie officielle qui préfère la liberté absolue dans l'apprentissage à la rigueur traditionnelle.
Un enseignement rigoureux est naturellement dogmatique au même titre qu'un enseignement récréatif est plus libre.
Que l'élève souhaite t'il ? Progresser ou se détendre ? A l'élève de trancher. Et au professeur le soin d'assouplir trop de rigueur ou d'affermir trop de laisser-aller. Le choix de l'élève étant initialement fortement influencé par la production artistique du professeur, révélatrice de la teneur du cours.
Dernière édition par carolus le Ven 28 Déc 2012 - 9:32, édité 1 fois
Re: Le kitch et l'esthétique de la mièvrerie
Francette a écrit:
J'ai remarqué que beaucoup de gens se ferment dès que les choses leur semblent inaccessibles... des phrases comme "je n'y comprends rien , ce n'est pas pour moi", l'histoire de l'art ça me"gave"..etc...
La consommation étant actuellement la religion officielle mondiale, les masses sont encouragées par les médias à refuser tout effort de la conscience, et à n'envisager la culture que comme un divertissement (d'où l'invention du concept "d'animateur culturel"). On demande à la population de faire des achats et pas de réfléchir. A partir de là, au lieu d'avoir honte d'être incultes et intellectuellement paresseuses, certaines personnes sont fières de proclamer qu'elles "n'aiment pas se prendre la tête". Je n'ai heureusement jamais rencontré ce genre de comportement dans mes ateliers.
Re: Le kitch et l'esthétique de la mièvrerie
Que l'élève souhaite t'il ?
Ben oui : "qu'est-ce que donc qu'il souhaite l'élève"?
...trop de sujets pour un seul verbe c'est comme trop de couleurs d'un coup
C'est ça : quelques notions et hop --->"animateur" en plus ça coûte moins cher qu'un prof diplômé !l'invention du concept "d'animateur culturel"
Je n'en suis pas surpriseJe n'ai heureusement jamais rencontré ce genre de comportement dans mes ateliers.
Francette- Messages : 98
Points : 116
Date d'inscription : 06/12/2012
Re: Le kitch et l'esthétique de la mièvrerie
Où est-ce qu'on signe ?Thierry Marié a écrit:
Dans les ateliers, on peut lutter contre cette tendance en passant un "contrat" avec les personnes qui souhaitent apprendre "sérieusement" la peinture (ce qui implique une transformation de soi et de son rapport au visible qui peut être perturbante avant de se révéler passionnante).
Avant la liberté, il y a l’apprentissage ...carolus a écrit:
A chaque rentrée, je constate une hostilité grandissante vis à vis de la pédagogie officielle qui préfère la liberté absolue dans l'apprentissage à la rigueur traditionnelle.
alors OUI à la rigueur, la fermeté, la discipline, le « sérieux » euh… non !! la « passion »
Cath- Messages : 161
Points : 256
Date d'inscription : 13/10/2010
Re: Le kitch et l'esthétique de la mièvrerie
Cath aime les ateliers d'art disciplinaires (avec brimades et châtiments passionnés)
Il est temps de rédiger un règlement en s'inspirant de celui-ci : http://prisons-cherche-midi-mauzac.com/varia/reglement-general-pour-la-discipline-interieure-de-la-colonie-agricole-de-jommelieres-1891-10665
"Punitions.
« Les punitions se divisent ainsi :
1° Réprimandes
1° Pain sec – 1 repas ou 2 repas.
3° Salle de police (coucher en cellule)
4° Peloton de punition.
5° Cellule.
6° Cachot (cellule noire).
7° Proposition d’envoi en quartier correctionnel."
Il est temps de rédiger un règlement en s'inspirant de celui-ci : http://prisons-cherche-midi-mauzac.com/varia/reglement-general-pour-la-discipline-interieure-de-la-colonie-agricole-de-jommelieres-1891-10665
"Punitions.
« Les punitions se divisent ainsi :
1° Réprimandes
1° Pain sec – 1 repas ou 2 repas.
3° Salle de police (coucher en cellule)
4° Peloton de punition.
5° Cellule.
6° Cachot (cellule noire).
7° Proposition d’envoi en quartier correctionnel."
Re: Le kitch et l'esthétique de la mièvrerie
Le kitch est surtout présent dans l'attitude du peintre. Lorsqu'il filtre son intuition, son inspiration, sa vitalité par un tissus de représentations de ce qu'il croit être l'art. Quoi qu'il fasse, il rend lourd tout ce qui est léger, il rend ridicule ce qui pourrait être magique. Le kitch est l'expression d'un art socialisant et psychologisant qui tourne toujours à la farce. Le kitch nous renseigne en négatif sur ce que peut être l'art. Avant d'être dans l'oeuvre, le caractère doit surtout être dans l'artiste. Si celui ci puise ses références dans des artistes de caractère, il indique qu'il n'en a pas beaucoup lui même. Le maître antikitch est toujours à l'intérieur de nous, il se nourrit à mon sens de la perception directe du ici et maintenant. La toile de fond du panorama est la Nature.
Re: Le kitch et l'esthétique de la mièvrerie
D'ailleurs, la nature elle-même n'est jamais kitch (il me semble). Un coucher de soleil est parfois kitch en peinture, il ne l'est pas dans la nature. Sans doute parce que la nature, elle, est sans cesse renouvelée et qu'elle ne semble pas prendre de posture pour produire un effet, se donner des manières ou du caractère. Elle est. Elle ne rajoute rien à ce qu'elle est.
Re: Le kitch et l'esthétique de la mièvrerie
La peinture de Munier est effrayante.
@ Sylvain :
Avant d'être dans l’œuvre, le caractère doit surtout être dans l'artiste
Assez d'accord. Avant de donner à voir, l'artiste voit. La réceptivité en lui précède la productivité. Finkielkraut
Si celui ci puise ses références dans des artistes de caractère, il indique qu'il n'en a pas beaucoup lui même.
Pas d'accord. Rodin avait du caractère et fut grandement inspiré par Michel-Ange et la terribilita c'est du vrai caractère.
@ Sylvain :
Avant d'être dans l’œuvre, le caractère doit surtout être dans l'artiste
Assez d'accord. Avant de donner à voir, l'artiste voit. La réceptivité en lui précède la productivité. Finkielkraut
Si celui ci puise ses références dans des artistes de caractère, il indique qu'il n'en a pas beaucoup lui même.
Pas d'accord. Rodin avait du caractère et fut grandement inspiré par Michel-Ange et la terribilita c'est du vrai caractère.
Re: Le kitch et l'esthétique de la mièvrerie
carolus a écrit:La peinture de Munier est effrayante.
Je pense même qu'elle aurait sa place dans un film d'horreur, par exemple sur les murs d'un tueur sadique compulsif ou d'une grand-mère qui assassinerait les gens en leur offrant des tartes aux pommes empoisonnées, ça créerait un contrepoint intéressant.
Re: Le kitch et l'esthétique de la mièvrerie
"– Je crois que, bien scruté, le kitsch apparaîtra comme un cauchemar, par toutes les exclusions et les mensonges sur nos vies qu’il suppose. Les petits chats dans des paniers des calendriers des Postes, les nains de jardin, sont peut-être misérables. Mais au fond ils sont terrifiants. Que dire d’un être satisfait, d’un être « Sam’suffit » ? Rien n’est aussi effrayant, disait Pinter, que la vision d’une tondeuse à gazon sur une pelouse...
Le dernier problème sera celui des stratégies à adopter face au kitsch. Il ne faut d’abord pas se laisser duper au jeu de la provocation : s’il y a un « kitsch doux » (Mireille Mathieu, Delly, le « ciné-loukoum »), il y a aussi un « kitsch aigre » qui n’est que l’envers du premier, et qui est tout aussi inconsistant que le premier : Madonna, Djian, etc. Les caractéristiques sont les mêmes : émotion toujours, et de plus en plus, et le moins de pensée ou de réflexion possible. Combien d’œuvres « mode » qui se veulent provocantes ou scandaleuses, et qui ne sont que kitsch ! "
Michel Théron
http://ddata.over-blog.com/xxxyyy/3/96/42/10/Conferences/Le-Kitsch.pdf
Le dernier problème sera celui des stratégies à adopter face au kitsch. Il ne faut d’abord pas se laisser duper au jeu de la provocation : s’il y a un « kitsch doux » (Mireille Mathieu, Delly, le « ciné-loukoum »), il y a aussi un « kitsch aigre » qui n’est que l’envers du premier, et qui est tout aussi inconsistant que le premier : Madonna, Djian, etc. Les caractéristiques sont les mêmes : émotion toujours, et de plus en plus, et le moins de pensée ou de réflexion possible. Combien d’œuvres « mode » qui se veulent provocantes ou scandaleuses, et qui ne sont que kitsch ! "
Michel Théron
http://ddata.over-blog.com/xxxyyy/3/96/42/10/Conferences/Le-Kitsch.pdf
Re: Le kitch et l'esthétique de la mièvrerie
Le kitch comme pléonasme, selon Roland Barthes :
"Cet art est essentiellement signalétique, il n’a de cesse d’imposer non l’émotion, mais les signes de l’émotion. C’est ce que fait précisément Gérard Souzay : ayant, par exemple, à chanter une tristesse affreuse, il ne se contente ni du simple contenu sémantique de ces mots, ni de la ligne musicale qui les soutient : il lui faut encore dramatiser la phonétique de l’affreux, suspendre puis faire exposer la double fricative, déchaîner le malheur dans l’épaisseur même des lettres; nul ne peut ignorer qu’il s’agit d’affres particulièrement terribles. Malheureusement, ce pléonasme d’intentions étouffe et le mot et la musique, et principalement leur jonction, qui est l’objet même de l’art vocal. Il en est de la musique comme des autres arts, y compris la littérature : la forme la plus haute de l’expression artistique est du côté de la littérature, c’est-à-dire en définitive d’une certaine algèbre : il faut que toute forme tende à l’abstraction, ce qui, on le sait, n’est nullement contraire à la sensualité.
Et c’est précisément ce que l’art bourgeois refuse: il veut toujours prendre ses consommateurs pour des naïfs à qui il faut mâcher le travail et surindiquer l’intention de peur qu’elle ne soit suffisamment saisie (mais l’art est aussi une ambiguïté, il contredit toujours, en un sens, son propre message, et singulièrement la musique, qui n’est jamais, à la lettre, ni triste, ni gaie). Souligner le mot par le relief abusif de la phonétique, vouloir que la gutturale du mot creuse soit la pioche qui entame la terre, et la dentale du sein la douceur qui pénètre, c’est pratiquer une littérature d’intention, non de description, c’est établir des correspondances abusives. Il faut d’ailleurs rappeler ici que l’esprit mélodramatique, dont relève l’interprétation de Gérard Souzay, est précisément l’une des acquisitions historiques de la bourgeoisie : on retrouve cette même surcharge d’intentions dans l’art de nos acteurs traditionnels, qui sont, on le sait, des acteurs formés par la bourgeoisie et pour elle.
Cette sorte de pointillisme phonétique, qui donne à chaque lettre une importance incongrue, touche parfois à l’absurde : c’est une solennité bouffonne que celle qui tient au redoublement des n de solennel, et c’est un bonheur un peu écoeurant que celui qui nous est signifié par cette emphase initiale qui expulse le bonheur de la bouche comme un noyau. Ceci rejoint d’ailleurs une constante mythologique dont nous avons déjà parlé à propos de la poésie : concevoir l’art comme une addition de détails réunis, c’est-à-dire pleinement signifiants : le perfection pointilliste de Gérard Souzay équivaut très exactement au goût de Minou Drouet pour la métaphore de détail, ou aux costumes des volatiles de Chantecler, faits (en 1910) de plumes superposées une à une, il y a dans cet art une intimidation par le détail, qui est évidemment à l’opposé du réalisme, puisque le réalisme suppose une typification, c’est-à-dire une présence de la structure, donc de la durée.
Cet art analytique est voué à l’échec surtout en musique, dont la vérité ne peut être jamais que d’ordre respiratoire, prosodique et non phonétique. Ainsi les phrasés de Gérard Souzay sont sans cesse détruits par l’expression excessive d’un mot, chargé maladroitement d’inoculer un ordre intellectuel parasite dans la nappe sans couture du chant. Il semble que l’on touche ici une difficulté majeure de l’exécution musicale : faire surgir la nuance d’une zone interne de la musique, et à aucun prix ne l’imposer de l’extérieur comme un signe purement intellectif : il y a une vérité sensuelle de la musique, vérité suffisante, qui ne souffre pas la gêne d’une expression. C’est pour cela que l’interprétation d’excellents virtuoses laisse si souvent insatisfaits : leur rubato, trop spectaculaire, fruit d’un effort visible vers la signification, détruit un organisme qui contient scrupuleusement en lui-même son message. Certains amateurs, ou mieux encore certains professionnels qui ont su retrouver ce que l’on pourrait appeler la lettre totale du texte musical, comme Panzéra pour le chant, ou Lipatti pour le piano, parviennent à n’ajouter à la musique aucune intention : ils ne s’affairent pas officieusement autour de chaque détail, contrairement à l’art bourgeois, qui est toujours indiscret. Ils font confiance à la matière immédiatement définitive de la musique."
Roland BARTHES - Mythologies : textes écrits entre 1954 et 1956; le livre lui-même a paru en 1957.
"Cet art est essentiellement signalétique, il n’a de cesse d’imposer non l’émotion, mais les signes de l’émotion. C’est ce que fait précisément Gérard Souzay : ayant, par exemple, à chanter une tristesse affreuse, il ne se contente ni du simple contenu sémantique de ces mots, ni de la ligne musicale qui les soutient : il lui faut encore dramatiser la phonétique de l’affreux, suspendre puis faire exposer la double fricative, déchaîner le malheur dans l’épaisseur même des lettres; nul ne peut ignorer qu’il s’agit d’affres particulièrement terribles. Malheureusement, ce pléonasme d’intentions étouffe et le mot et la musique, et principalement leur jonction, qui est l’objet même de l’art vocal. Il en est de la musique comme des autres arts, y compris la littérature : la forme la plus haute de l’expression artistique est du côté de la littérature, c’est-à-dire en définitive d’une certaine algèbre : il faut que toute forme tende à l’abstraction, ce qui, on le sait, n’est nullement contraire à la sensualité.
Et c’est précisément ce que l’art bourgeois refuse: il veut toujours prendre ses consommateurs pour des naïfs à qui il faut mâcher le travail et surindiquer l’intention de peur qu’elle ne soit suffisamment saisie (mais l’art est aussi une ambiguïté, il contredit toujours, en un sens, son propre message, et singulièrement la musique, qui n’est jamais, à la lettre, ni triste, ni gaie). Souligner le mot par le relief abusif de la phonétique, vouloir que la gutturale du mot creuse soit la pioche qui entame la terre, et la dentale du sein la douceur qui pénètre, c’est pratiquer une littérature d’intention, non de description, c’est établir des correspondances abusives. Il faut d’ailleurs rappeler ici que l’esprit mélodramatique, dont relève l’interprétation de Gérard Souzay, est précisément l’une des acquisitions historiques de la bourgeoisie : on retrouve cette même surcharge d’intentions dans l’art de nos acteurs traditionnels, qui sont, on le sait, des acteurs formés par la bourgeoisie et pour elle.
Cette sorte de pointillisme phonétique, qui donne à chaque lettre une importance incongrue, touche parfois à l’absurde : c’est une solennité bouffonne que celle qui tient au redoublement des n de solennel, et c’est un bonheur un peu écoeurant que celui qui nous est signifié par cette emphase initiale qui expulse le bonheur de la bouche comme un noyau. Ceci rejoint d’ailleurs une constante mythologique dont nous avons déjà parlé à propos de la poésie : concevoir l’art comme une addition de détails réunis, c’est-à-dire pleinement signifiants : le perfection pointilliste de Gérard Souzay équivaut très exactement au goût de Minou Drouet pour la métaphore de détail, ou aux costumes des volatiles de Chantecler, faits (en 1910) de plumes superposées une à une, il y a dans cet art une intimidation par le détail, qui est évidemment à l’opposé du réalisme, puisque le réalisme suppose une typification, c’est-à-dire une présence de la structure, donc de la durée.
Cet art analytique est voué à l’échec surtout en musique, dont la vérité ne peut être jamais que d’ordre respiratoire, prosodique et non phonétique. Ainsi les phrasés de Gérard Souzay sont sans cesse détruits par l’expression excessive d’un mot, chargé maladroitement d’inoculer un ordre intellectuel parasite dans la nappe sans couture du chant. Il semble que l’on touche ici une difficulté majeure de l’exécution musicale : faire surgir la nuance d’une zone interne de la musique, et à aucun prix ne l’imposer de l’extérieur comme un signe purement intellectif : il y a une vérité sensuelle de la musique, vérité suffisante, qui ne souffre pas la gêne d’une expression. C’est pour cela que l’interprétation d’excellents virtuoses laisse si souvent insatisfaits : leur rubato, trop spectaculaire, fruit d’un effort visible vers la signification, détruit un organisme qui contient scrupuleusement en lui-même son message. Certains amateurs, ou mieux encore certains professionnels qui ont su retrouver ce que l’on pourrait appeler la lettre totale du texte musical, comme Panzéra pour le chant, ou Lipatti pour le piano, parviennent à n’ajouter à la musique aucune intention : ils ne s’affairent pas officieusement autour de chaque détail, contrairement à l’art bourgeois, qui est toujours indiscret. Ils font confiance à la matière immédiatement définitive de la musique."
Roland BARTHES - Mythologies : textes écrits entre 1954 et 1956; le livre lui-même a paru en 1957.
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Forum des Artistes Lorrains :: LE CAFÉ DES ARTS : DÉBATS ET DISPUTES :: Débats sur l'histoire et la philosophie de l'art
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Jeu 16 Avr 2020 - 6:49 par caveyrac
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